le baracoon

Publié le par Gérard

Après deux jours et demi de marche depuis le lieu où Boloo et moi avions été enlevés, nous arrivions dans un baracoon situé à proximité de l’océan d’Ethiopie non loin de la ville d’Accra (1) et d’un fort assez ancien qui avait été érigé par les Hollandais. Dans ce lieu de transit se tenaient déjà une bonne trentaine de prisonniers, des hommes jeunes pour la plupart. Les prisonniers étaient entravés par de lourdes chaînes. Des hommes de couleur en armes assuraient la surveillance. Certains prisonniers étaient là depuis près d’un mois dans l’attente du sort qui allait leur être réservé.

Régulièrement, les sentinelles nous sortaient du baracoon par petits groupes et nous obligeaient à danser au son d’un vieil harmonica. Leur démarche se voulait une forme de début de dressage. Le Noir qui ne s’exécutait pas était frappé mais toujours avec une relative précaution ; il ne fallait surtout pas abîmer la « marchandise » en transit dont les guerriers avaient la garde.

Dans le baracoon, une semaine après notre arrivée, trois Noirs, deux hommes et une femme originaires de la région d’Atakpamé dans le Dahomey se donnaient la mort ; deux en se faisant étrangler et le troisième en se cognant la tête sur un mur de pierre. Ces trois malheureux croyaient qu’ils allaient être vendus à des Blancs qui pratiquaient le cannibalisme et que ceux-ci allaient fabriquer des chaussures avec leur peau. Il avait été impossible de leur faire entendre raison. Je crois même qu’après ces suicides le doute avait fini par gagner plusieurs autres Noirs du baracoon. L’attente dans ce lieu était interminable et l’angoisse des captifs était à son comble.

(1) Accra : ville côtière qui s’est développée à partir des forts qui avaient été construits par les Européens au cours du XVII siècle pour la traite négrière (forts britannique, anglais et danois). Elle est devenue la capitale du Ghana pays qui a obtenu son indépendance en mars 1957.

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